Danse Macabre de La Ferté Loupière

Danse Macabre de La Ferté Loupière

situation de l’église de la Ferté-Loupière

 


Vidéo de présentation de la Danse Macabre



La danse macabre de La Ferté Loupière

C’est en 1424 qu’est peinte la première danse macabre sur les murs du charnier du cimetière des Saints Innocents à Paris. Le charnier  a été détruit en 1669, et les corps du cimetière transférés aux Catacombes, juste avant la révolution française.  L’imprimerie inventée par Gutemberg en 1454, ne va pas tarder à la faire diffuser, d’abord en France puis dans toute l’Europe, puisqu’en 1485 l’éditeur parisien Guyot Marchant reproduit sur papier la danse macabre des St Innocent avec son texte en français. D’autres éditeurs publient des danses macabres, en particulier Lerouge, imprimeur vers 1500 à Chablis dans l’Yonne, puis installé à Troyes en1510.

Après la dernière édition de Nicolas Le Rouge (1531), on ne retrouve pas de trace de la Danse macabre à  Troyes jusqu’à ce qu’elle apparaisse dans certains inventaires de stocks de libraires, à partir de 1623. La plus ancienne édition de colportage conservée date de 1641. Après cette date, elle sera constamment rééditée par les deux grandes familles rivales d’imprimeurs de la Bibliothèque bleue, les Oudot et les Garnier, et par leur successeur Baudot, jusqu’en 1840. Même si le texte est progressivement retouché, si les bois sont remplacés au fur et à mesure qu’ils deviennent inutilisables, le modèle initial resta ainsi presque inchangé pendant près de quatre siècles.

Les femmes, exclues dans les premières danse macabre, apparaissent dans le courant du XVIe siècle et ont même leur propre danse macabre, reproduite dans l’ouvrage de Lerouge.

La Bibliothéque Nationale de France en conserve un exemplaire

C’est à partir de ces livres, comme modèle, que sont peintes sur les murs des églises des danses macabres. Celle de la Ferté Loupière est la copie conforme, en plus petite, de celle reproduite par Lerouge

Dans l’édition de Lerouge la danse macabre représente 40 couples mort(squelette)-vif dont,

le Pape – L’Empereur
le Cardinal – Le Roi
Le Légat – Le Duc
le Patriarche – Le Connétable
L’archevesque – le Chevalier
  L’evesque – L’Ecuyer
L’abbe – Le Bailly
L’astrologue – Le Bourgeois
le Chanoine – Le Marchand
Le maître d’école – L’Homme d’arme
Le Chartreux – Le Sergent
Le Moine L’Usurier
Le Médecin – L’Amoureux
L’Avocat – Le Menestrel
Le Curé – Le laboureur
Le promeneur- Le Géolier
Le Pélerin – Le Berger
Le Cordelier – L’Enfant
L’Aventurier – Le Fou
Le clerc l ‘Ermite

En sont absents les personnages figurant au milieu de la danse macabre, représentant le clergé intermédiaire et la haute bourgeoisie qui naturellement n’étaient pas présente à l’époque à La Ferté Loupière.

Outre cette absence, il y a 3 différences avec l’édition papier,:

-le roi représenté sous les traits de François 1er

– le duc habillé également en costume d’époque

-la danse macabre est ouverte par 3 squelettes sur le mur contre 4 dans l’édition papier.

 

L’église de la Ferté Loupière dédiée à St Germain, fut construite au XII siècle et subit un certain nombre d’aménagements au XV è et XVI è siècle, en particulier, par la volonté de Pierre de Courtenay et de son épouse Perine de la Roche entre l’année de son mariage, 1471, et celle de sa mort 1504.

 

C’est au cours de ces trente trois années que le mur intérieur nord de cette église fut décoré de peintures, réalisés sur enduit sec, ultérieurement recouvertes de badigeon, puis mise à jour, en 1910, par le marquis de Tryon-Montalembert et par l’abbé Mertens. Ces peintures ont été restaurés en 1953.

vue d'ensemble

L’église de St Germain comporte 4 peintures murales:

– Le Dict des Trois Morts et des Trois Vifs, thème fréquemment représenté dans les églises de Puisaye,

– La Danse Macabre qui se déroule, sur près de vingt cinq mètres, son cortège de vivants escortés par la Mort, suit le Dict des Trois Morts et des Trois Vifs.

– Saint Michel terrassant le démon, en dessous de la danse macabre

– la Vierge de l’Annonciation, en dessous de la danse macabre

 

dict des trois morts

le “Dict des trois morts et des trois vifs” ou “Rencontre des trois morts et des trois vifs”

Antérieurement à la Danse Macabre (qui met en scène la Mort entraînant à sa suite une farandole hiérarchique de vivants), le Dit des trois Morts et des trois Vifs (ou Dict, ou légende) représente, sous forme de peinture, de miniature, d’enluminure ou de sculpture, trois cadavres s’adressant à trois jeunes piétons (ou trois jeunes cavaliers) richement parés, souvent en train de chasser. Ici, le thème n’est pas la mort en soi, mais plutôt la leçon, l’avertissement d’une décomposition, d’une pourriture à venir dans un futur plus ou moins lointain, d’où la nécessité de faire acte de contrition pour l’éviter.

 

Le premier texte connu relatif au Dict des trois Morts et des trois Vifs, date des années 1280.

 

Sur le mur nord de la nef, à gauche de la danse macabre, sur la 1ère travée est représenté le “Dict des trois morts et des trois vifs”, suivant un texte littéraire du XIIème siècle.

A gauche, trois squelettes couverts d’un linceul, le premier muni d’une lance et d’une faux, s’avance vers une croix. Un oiseau perché sur la croix observe la scène.

A droite trois cavaliers sont à la chasse. Le 1er cavalier est surpris et son cheval se cabre. Le 3ème cavalier fait demi-tour.

Au dessus des trois cavaliers volent deux faucons.

Au pied des chevaux, sont représentés des arbres rabougris, ainsi que deux chiens qui hurlent.

Cette scène sert de prologue à la danse macabre : trois jeunes cavaliers sont surpris dans leur partie de chasse par la vision de trois morts qui leur font face de l’autre côté d’une croix. Ici aussi, la vie est précaire, la mort peut être brutale, quels que soient le moment et la condition sociale.

danse macabre

La Danse Macabre

 

La Danse Macabre suit le “Dict des trois morts et des trois vifs”.

Elle court sur 25 m de mur et met en scène 42 personnages.

Cette danse macabre du XVe siècle (des squelettes entraînent des hommes dans leur ronde) avait choqué parce qu’elle plaçait tout le monde à égalité face à la mort, ecclésiastiques comme gens du peuple. Le pape l’avait donc fait recouvrir.

Résultat : la fresque a traversé les siècles sans trop d’encombre.

De gauche à droite :

Sous un arc, l’auteur assis écrit sur un parchemin.
3 morts

Trois squelettes musiciens jouent respectivement de la cornemuse, de l’orgue portatif et de la harpe.
3 morts
Ensuite suivent 19 couples mort(squelette)-vif.

A remarquer que la peinture murale de la Danse Macabre de La Ferté Loupière, ne respecte pas toujours la règle d’un homme de robe suivi d’un laïque, qui est systématique dans l’édition de Lerouge.

 

       le pape est le premier invité à ouvrir la danse par le squelette, qui lui retire vêtements et ornements pape
l’empereur couronné portant glaive et globe

doit se départir des attributs dus à son titre

empereur
le cardinal en rouge pour qui les regrets semblent vains, doit rejoindre le rang, malgré tous les égards passés cardinal
le roi couronné tenant le sceptre fleur  de lysé. Habitué à pompes et noblesses, il devra aussi laisser toute hautesse roi
le légat du Pape en violet dont le squelette saisit la croix, doit à son tour entrer dans la danse legat
  le duc habillé de court aux chausses rayées et toque à plume. Son squelette le prend par la main, après tant de beaux faits d’armes et de noblesse duc
le patriarche avec la croix à double traverse , ne sera jamais Pape patriache
L’Archevêque prié de rendre comptes et dettes archeveque
le connétable en pourpoint écartelé  qui lève son épée, en dépit de son intention d’assaillir châteaux et forteresses connetable
l’évêque mitré crosse en main  est sommé de rejoindre le cortège eveque
l’amoureux très élégant doit se résoudre à abandonner les délices de la séduction amoureux
l’avocat en noir les bras croisés, ne peut même pas plaider sa propre cause avocat
le ménestrel se voit contraint de  marcher sur sa vielle et son archet menestrel
le curé à qui le mort retire l’étole  ne peut se dérober curé
le laboureur une bêche sur l’épaule le cordelier qui a mené une vie rude et qui a souvent, souhaité sa mort ne peut y échapper laboureur
Le Franciscain qui  ne devrait pas craindre la mort, est cependant appelé à amender ses péchés franciscain
l’enfant assis dans son berceau, malgré son innocence, n’y échappe pas lui aussi enfant
le clerc dont la tristesse est manifeste clerc
l’ermite égrenant son chapelet, résigné mais reconnaissant des grâces qu’il a reçues.

Son squelette annonce  la fin de la Dance Macabre et salue le public

ermite

 

 

La Danse Macabre prend tout son sens dans cette triple moralité : la mort est universelle, inévitable et inattendue ;  elle rétablit l’égalité entre les hommes.

 

Sous cet ensemble sont représenté un ” Saint Michel terrassant le dragon ” et une ” Vierge de l’Annonciation”.

“Saint Michel terrassant le dragon “

st michel st michel
St Michel terrassant le dragon à La Ferté Loupière St Michel terrassant le dragon par Raphaël

 

 

 

Cette peinture est la reproduction d’un célèbre tableau de Raphaël. La ressemblance est presque totale. La question se pose de savoir si la peinture serait une copie du tableau de l’artiste, ou bien la reproduction d’une miniature d’inspiration italienne qui aurait elle-même servi de modèle à Raphaël. Seule la datation exacte de la peinture permettrait de trancher. Raphaël peignit son tableau en 1518. Il fut bientôt transporté à Fontainebleau et à Paris, où l’on peut toujours l’admirer au Louvre.

 

“La Vierge de l’Annonciation”.

Annonciation à la Vierge

 

Dans un encadrement architectural inspiré, ainsi que dans les ornements qui sont agrémentés de quelques miniatures, une femme auréolée d’un nimbe est agenouillée. Elle tient de la main gauche un livre ouvert. Sa main droite relevée marque l’étonnement. C’est, à n’en pas douter, la Vierge Marie recevant le salut de l’Ange qui la surprend dans son oraison. Le geste simple de la main, le sérieux du visage, le mystère du regard, offrent ce quelque chose qui rappelle la candeur naïve et la vie intense des vierges de l’Angelico.

 

 

Généralités

 

Durant l’époque mérovingienne, la peste s’était répandue dans toute l’Europe mais avait ensuite totalement disparue aussi bien en Occident qu’en Orient. En 1346, après six siècles d’absence, elle ressurgit dans la région de la mer Noire. En effet, à Caffa, Mongols et Génois s’affrontent. Au cours du siège, les Mongols, atteints de la peste contaminent les Génois. En regagnant Constantinople, les Italiens propagent à leur tour la maladie. Cette dernière se diffuse à Messine, puis à Marseille par l’intermédiaire de galères qui débarquent en novembre 1347.

Dévastatrice, la peste qui prend la forme pulmonaire, emporte des dizaines d’habitants du port méditerranéen. De Marseille, le fléau se répand vers le reste du pays et bientôt vers toute l’Europe.

La peste atteint Paris en juin 1348 puis elle touche le sud de la Grande-Bretagne et la Flandre.

L’hiver apporte une accalmie puis la progression reprend dès le printemps 1349. Cette épidémie tue beaucoup et est d’autant plus problématique qu’elle est récurrente. La pandémie de 1348 n’est que la première apparition d’un fléau qui va revenir à intervalles réguliers tous les dix ans environ, durant plus d’un siècle.

Les populations n’ont pas conscience que le mal dont elles souffrent est dû à des causes naturelles. Elles y voient un signe de la colère de Dieu et cherchent des responsables.

Inévitablement, les groupes marginaux de la société sont désignés comme victimes expiatoires. Les Juifs sont les premières cibles de cette colère. Accusés d’avoir empoisonné les puits, ils font l’objet de massacres répétés en France, en Suisse et en Allemagne.

Les catholiques organisent des pèlerinages pour conjurer l’ire divine. Les «  flagellants » ,  adeptes de la pénitence et de la flagellation en public, font leur apparition.

Le pape Clément VI incite les fidèles à plus de modération et condamne les flagellants en octobre 1349.

La peste fait disparaître en quelques mois, entre un tiers et la moitié de la population européenne. Une estimation plus précise est difficile. Seuls les registres de baptêmes et des enterrements a permis de prendre la mesure du désastre. Mais tous les calculs aboutissent à un minimum de 40% de décès dans chaque village.

Les plus riches et les mieux nourris sont moins touchés par le fléau. Le plus grave est que les enfants sont emportés en priorité, ce qui aura de graves conséquences sur la démographie pour les années à venir.

La maladie fait d’autant plus de ravages qu’elle touche une population qui souffre déjà de la famine et de la guerre.

En ce siècle de troubles, la mort est omniprésente.

Du point de vue économique, les conséquences de la peste sont très graves. Faute d’hommes, il y a une totale désorganisation de la production. Les champs sont en friche et des villages entiers abandonnés. La main d’oeuvre se raréfie partout et si, il y a une hausse des salaires, il y a également une hausse de l’inflation. Il faudra attendre la seconde moitié du XVe siècle pour que l’impact du fléau soit en partie réparé.

Mais la mort reste présente partout dans la vie quotidienne et la vie religieuse. C’est de cette époque que date la fameuse danse macabre qui orne les murs de l’église de la Ferté Loupière.

La mort est présente partout dans la vie quotidienne et la vie religieuse. Son église abrite la plus célèbre fresque murale de la Puisaye, l’une des treize danses macabres que l’on connaisse en France :

-1445-1500- Cloître Saint-Alvi à Albi, gravure sur engoulant de poutre

– 1450 -Temple neuf des protestants, ancienne église des dominicains, à Strasbourg (reproduction, l’original ayant été détruit durant la guerre de 1870 )

– vers 1450 – Plouha Côte d’Armor, Chapelle Kermaria an Iskuit.

– Peu après 1464- Kernascleden dans le Morbihan, église paroissiale Notre Dame

– 1460-1470 – La Chaise Dieu en Haute Loire. vrai fresque dans l’église de l’abbaye bénédictine de Saint-Robert. Une danse macabre sans texte, mais illustrant un poème. Elle date de 1470,

– 1486 (ou début XVIe) – Mesnay le Grenet dans l’Eure et Loir.

– Fin XVe, début XVIe – Cherbourg, basilique Sainte-Trinité, nef, vers 1500, restaurée XIXe siècle. Il ne s’agit pas d’une peinture mais de bas-reliefs , sculpture polychrome en ronde-bosse.

– Début XVIe – Brianny en Côte d’Or. église Sainte-Apolline

– Début XVIe : cimetière de Vienne (cloître Saint-Saturnin), vieux faubourg de Blois (sculptures sur chapiteaux de pierre).

– 1526-1532 : Cimetière Saint-Maclou de Rouen, sculptures sur les colonnes de la galerie

– 1712-1714 : Avrieux 73, chapelle Notre Dame des Neiges  – Preuilly sur Claise (Indre et Loire), chapelle de tous les Saints : peintures murales.